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Rencontre avec Olivier Millet, président de l’AFIC, défenseur d’une autre image des fonds français

Depuis 30 ans, Olivier Millet évolue dans le monde du Capital Investissement, terme largement usité aujourd’hui et qu’il a lui-même inventé en 1989 pour traduire l’expression « Private Equity ». Aujourd’hui à la tête de l’AFIC, association professionnelle qui regroupe les quelques 300 sociétés de capital-investissement actives en France, il défend une autre idée des fonds, ce qu’il appelle « la quatrième voie capitaliste ». Portrait.

 De passage à Paris, j’ai rencontré Olivier Millet, président du directoire d’Eurazeo PME et président de l’AFIC. Avec un parcours professionnel remarqué, Olivier a contribué à fonder des grands noms du Private Equity, Barclays PE France (devenu Equistone) et OFI PE (devenu Eurazeo PME) pour n’en citer que deux.

En cette fin d’année, Olivier est visiblement enthousiaste pour le secteur du Private Equity et également confiant pour la suite : « 2016 sera une belle année pour les fonds français qui attirent de nombreux investisseurs étrangers (la moitié des fonds levés au premier semestre 2016). En 2015, nous avons récolté près de 10 milliards d’euros au total et nous poursuivons cette trajectoire ascendante. » Les fonds français affirment en effet leur attractivité et retrouvent progressivement les niveaux de la période 2005-2008 (étude Grant Thornton). Côté investissement, leur activité est également très soutenue : au premier semestre 2016, les membres de l’AFIC ont collectivement investi 5,5 md€ (+47% vs S1 2015).

 

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La France se hisse à la première place du capital investissement européen par le nombre d’entreprises accompagnées. « Notre pays a un véritable atout : elle recèle un grand nombre de sociétés non cotées de petite taille, deux fois plus que le Royaume Uni, explique Olivier. Les fonds sont là pour transformer toutes ces PME en ETI ». Désormais, il faudra parler de « Capital Transformation ». Sur les 6 premiers mois de 2016, plus de 1000 entreprises (+23%) ont ouvert leur capital aux fonds. L’objectif de l’AFIC est clair : booster cette tendance positive non sans poser les bases d’un capital investissement, à la française.

Loin de se satisfaire de ces bons chiffres, Olivier Millet en questionne le sens et se demande quel est l’ADN de ce Capital investissement français émergent: « Une véritable révolution capitaliste est en marche, explique-t-il dans les colonnes du Figaro. Le capital-investissement émerge comme le quatrième pilier du capitalisme, plus collectif et adapté à l’air du temps, aux côtés des formes plus traditionnelles de l’actionnariat, familial, boursier et d’État. Il est désormais structuré et très segmenté.» Olivier Millet défend ainsi avec force un « capitalisme collectif et de rotation » où les fonds sont des investisseurs responsables et de longue durée, accompagnant les sociétés sur des périodes de 5 à 10 ans pour les faire grandir. « Peu de gens en ont conscience mais, en France, 10% des emplois sont liés au capital investissement, souligne-t-il. Les fonds sont des acteurs de l’économie réelle et participent du développement du tissu économique français. » Il faut noter que ce fervent défenseur de l’investissement responsable est heureux de constater que le capital-investissement français s’est collectivement emparé de l’ESG, devenu un thème d’action au quotidien. L’AFIC publie d’ailleurs depuis 3 ans un rapport annuel sur le footprint positif et l’effet d’entrainement du secteur dans ce domaine.

Cette sensibilité à la réalité du terrain a conduit également l’AFIC à publier chaque année un rapport indépendant avec EY sur l’impact économique et social du Private Equity. L’étude 2015, rendue publique ce 13 décembre, est éloquente : au total, 256 000 emplois ont été crées en France par le Capital investissement et ce en 5 ans seulement. « La dynamique de croissance des entreprises accompagnées par le capital-investissement français se poursuit et se traduit par de nouvelles créations d’emplois, nettes des suppressions, note Olivier Millet. Avec l’objectif que s’est fixé le capital-investissement français de doubler à 5 ans les capitaux disponibles pour les entreprises ayant des projets de transformation, le secteur est un réel levier pour accompagner la reprise de la croissance économique et de l’emploi. »

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Un succès également en termes de croissance : fin 2015, les entreprises françaises accompagnées par le capital-investissement français affichent un chiffre d’affaires cumulé de 225 milliards d’euros, soit l’équivalent de près d’un cinquième du chiffre d’affaires cumulé du CAC40 à la même date. La croissance de leur chiffre d’affaires est près de 3 fois supérieure au PIB nominal français entre 2010 et 2015 (+33,2% vs + 12,5%), et près de 2 fois supérieure en 2015 (+3,7% vs + 1,9%).

Et Olivier Millet de conclure notre rendez-vous avec un message à diffuser en France mais aussi au-delà de l’Atlantique : « Le private equity est en train de contribuer à construire les bases de l’économie de demain. Via cette quatrième voie capitaliste, il est possible d’envisager un avenir où les intérêts de la société convergent, qu’il s’agisse des entreprises, des citoyens et de l’Etat. » Pour soutenir cette tendance, il voit toutefois « deux adaptations nécessaires en France : une meilleure fluidité de l’épargne vers le non coté, et une évolution des mécanismes qui figent le capital des PME ».

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Les fonds français aux US (3/3): portrait de Partech, pionnier parmi les fonds français dans la Valley

De New-York à San Francisco, quand on parle des fonds français présents aux US, un nom revient systématiquement, celui de Partech. Rien d’étonnant : cet investisseur pionnier a ouvert son premier bureau à San Francisco en 1982, alors qu’il était encore une filiale de Paribas. Depuis, il a pris son indépendance et s’est déployé à Paris et Berlin et enregistré un bon nombre de success stories qui ont fait la Une des médias, de Business Objects à PriceMatch (acquis par Booking.com) en passant par Pulse.io (acquisition de Google). Le fonds revendique 21 introductions en bourse et plus de 50 cessions stratégiques supérieures à 100 millions de dollars auprès de grandes entreprises internationales.  Leur dernière actualité en date : la levée de 100 millions d’euros pour leur nouveau véhicule d’amorçage. Nous avons donc rencontré Reza Malekzadeh, Général Partner de Partech basé dans la Valley, i.e. le Français le mieux placé aux US pour nous parler de Private Equity des deux côtés de l’Atlantique.
 

Reza, tu possèdes une très solide connaissance du milieu des VC américains et français : quelles sont les principales différences en termes de travail ?
Les différences sont notables à toutes les étapes de l’investissement. Tout d’abord, en France, les entreprises passent souvent par des apporteurs d’affaires, ce qui n’existe absolument pas ici. Faire appel à un leveur de fonds dans la Valley serait même perçu comme un très mauvais signe envoyé aux fonds. Aux Etats-Unis, le networking est la clé pour trouver des deals : les investisseurs misent sur leur réseau personnel, développé au fil de leur carrière. C’est un métier très humain, où la notion de confiance est centrale.

La vitesse d’investissement est également bien plus rapide aux US qu’en Europe : comment l’explique-t-on ? Et qu’en est-il en termes d’accompagnement ?
C’est vrai, les fonds américains sont très réactifs avec une réelle volonté de préempter les deals. Les investisseurs de la Valley veulent aller directement sur le terrain alors que les Français accordent beaucoup d’importance à la due diligence et à l’analyse en amont. Ces derniers ont une approche plus prudente et donc attendent plus longtemps avant d’investir. Pour donner un exemple, le fonds Benchmark Capital (investisseur de la première heure dans Twitter, Uber Snapchat…)  a engagé 10 millions d’euros auprès de Docker, avant même que ce dernier n’ait sorti de produit ! On explique cette réactivité par une culture business et l’acceptation d’échouer, typiquement américaines. En termes d’accompagnement des entreprises,  les fonds américains ne sont pas plus « hands-on »  et on ne peut pas dire que les investisseurs soient plus présents auprès de leurs participations. Toutefois, la principale différence reste toujours la réactivité : ils sont là dès que l’on a besoin d’eux et très à l’écoute des besoins de leurs investissements.

Quel conseil donnerais-tu à un fonds français qui veut s’installer aux US ?
La clé est de comprendre la culture locale de la Valley et de savoir s’y adapter. Ici, les codes business sont extrêmement différents. Les investisseurs ont, par exemple, pignon sur rue : quand on cherche à joindre quelqu’un, qu’il soit de haut niveau ou non, on obtient une réponse rapide et directe de son interlocuteur. D’ailleurs, il ne faut pas s’étonner de l’aspect abrupt de certaines réponses : les gens ne veulent pas vous faire perdre de temps. Cela vaut pour bien d’autres codes également. Le tout est de les connaître et de savoir les employer.

Quelle est l’image des fonds français et plus particulièrement de Partech ici ?
Les relations entre les fonds US et les fonds français sont très bonnes. Pour preuve, il n’est pas rare de les voir co-investir dans des start-ups ici : je peux ainsi citer notre investissement dans Tribe dans lequel Sequoia est partie prenante. Partech est vu comme un fonds européen transatlantique qui a un accès privilégié à un dealflow européen. Plus globalement, je ne pense pas que la France ait un problème d’image mais elle devrait plus miser sur ses atouts. Je fais notamment référence à l’intelligence artificielle ou à nos data scientists, deux domaines dans lesquels nous sommes en avance et que nous devrions mieux valoriser ici. Sur ces questions, les efforts de BpiFrance et de la French Tech vont dans la bonne direction même s’il reste encore beaucoup de marge avant d’arriver au niveau des Israéliens et des Indiens qui savent très bien se vendre dans la Valley.

Quelles sont les perspectives dans la Silicon Valley pour les prochains mois ?
Depuis un an, on a observé une correction des valorisations. Le dealflow a été nettoyé, écartant les entreprises trop valorisées. Je crois que ce réajustement est un bon signe : les entreprises constituent à présent leurs dossiers avec beaucoup plus de soin. En ce qui concerne Partech, nous allons continuer notre développement ici mais également sur la côte est des Etats-Unis pour construire de nouvelles success stories !

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Découverte du club French Founders version New York

Créé il y a deux ans à peine, le très sélectif club French Founders se définit comme « le club business, next-generation des dirigeants et fondateurs francophones – partout dans le monde ». Dans les faits, il se démarque par la qualité de son contenu et de son audience lors de ses événements. L’une des dernières conférences en date : la rencontre d’une douzaine de start-ups françaises triées sur le volet et de fonds d’horizons divers, lors d’une soirée spéciale à New-York.

Loin de se positionner comme les traditionnels clubs pour expatriés qui veulent simplement se constituer un réseau ou comme une association de promotion des start-ups aux US, French Founders rassemble, anime et fédère activement une communauté française issue de secteurs divers et d’entreprises de toutes tailles. Actuellement, ce club de cadres et dirigeants regroupe plus de 1700 membres sur 3 continents (Amérique, Europe et Asie) avec, comme objectif affiché d’apporter à chacun des membres une attention et un traitement personnalisé pour favoriser le développement des business français dans le monde.

Parmi les 200 événements organisés chaque année par French Founders, la soirée Start-up to VC participe pleinement de ce principe d’efficacité et de service sur-mesure. Deux fois par an, un jury -composé de fonds et de business angels accompagnés par French Founders sélectionnent ainsi une poignée de start-ups fondées par des entrepreneurs français exclusivement. Ces derniers peuvent, à cette occasion, rencontrer des investisseurs potentiels pour présenter leur projet, leurs business model et leurs ambitions. C’est l’occasion d’échanges et de prises de contacts dans la perspective, à plus long terme, de levées de fonds.

Le 15 novembre dernier, 14 jeunes entreprises françaises ont eu la chance non négligeable de discuter longtemps avec des investisseurs locaux – ce qui, comme vous le savez, n’est pas chose aisée car les fonds à New-York, sont très sollicités et les jeunes entreprises nombreuses. Quatre start-ups tirées de cette sélection étaient invitées à se présenter en public, devant l’assemblée des invités composée principalement de membres de l’écosystème new-yorkais, soit 20 investisseurs US et 10 fonds français des start-uppers en devenir ainsi qu’Anne-Claire Legendre, Consule Générale de France. Une visibilité inédite pour certains start-uppers ! Les quatre jeunes pousses mises en lumière ce jour-là devant l’audience provenaient d’horizons très divers, tant en termes de secteurs que de provenances géographiques (Boston, San Francisco, NYC, Shanghai…). Les fondateur de Cobalt (créateur d’avions privés du futur), Try the World (les fameuses box de produits gourmets), Allure Systems (concepteur de mannequins en VR pour les marques de vêtements) et  Biomodex (créateur d’organes 3D pour l’entraînement des chirurgiens) ont pu transmettre leurs visions et ambitions. La deuxième partie de la soirée était, elle, consacrée à des rencontres en tête-à tête et en privé entre les entreprises sélectionnées et le pool d’investisseurs.

J’étais aux premières loges, puisque French Founders m’avait proposé d’être Maître de Cérémonie pour cet événement, diffusé en direct sur Facebook. Je peux donc témoigner aujourd’hui de l’efficacité du club : start-uppers désireux de communiquer des deux côtés de l’Atlantique m’ont demandé de leur présenter mon activité de RP pour les fonds et les start-ups aux US.

Pour terminer, voici quelques pistes d’associations et d’institutions qui peuvent vous ouvrir de nouveaux réseaux lors de votre implantation aux Etats-Unis :

  • French Founders est un club qui sélectionne ses membres et leur propose un accueil sur-mesure en les mettant en relation et en attirant leur attention sur les événements pertinents pour eux. Les membres du réseau sont actifs et de haut niveau.
  • La French-American chamber of commerce propose des espaces de co-working, des forums thématiques et sectoriels et des soirées festives pour animer son réseau.
  • Le programme Impact USA  de Bpifrance permet à 18 start-ups sélectionnées de partir pour les US (San Francisco et NYC) avec, comme objectif, de « réaliser en 10 semaines ce qui leur aurait pris un an ». Les jeunes entrepreneurs sont coachés et accompagnés de très près par des experts dans tous les domaines.
  • Business France est souvent la première porte à laquelle frappent les start-uppers. C’est un bon moyen d’approcher le marché américain et d’en connaître les contours globaux avec une approche très institutionnelle.
  • Le Consulat de France à New-York a également lancé des soirées de pitch pour start-uppers français, sous l’impulsion de la nouvelle Consule Générale de France, Anne-Claire Legendre qui compte mettre l’innovation française au coeur de sa communication.
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Le côté obscur d’une start-up: critique littéraire de Disrupted et ITW de l’auteur

Tirer à boulets rouges sur le monde des start-ups semble être un leitmotiv chez plusieurs auteurs américains en 2016. Après avoir glorifié le monde des jeunes pousses de la tech et de l’innovation, certains revoient aujourd’hui leur jugement, surtout quand leur expérience personnelle diffère l’image d’Epinal que la Valley s’efforce de nous vendre. C’est le cas du best-seller autobiographique de Dan Lyons, Disrupted

Sorti au printemps dernier et savoureusement sous-titré « ma mésaventure dans le bulle des start-ups », l’ouvrage retrace le parcours (réel) de son auteur. Quinquagénaire féru de nouvelles technologies, journaliste de longue date chez Newsweek et Forbes, Dan doit affronter un chômage inattendu et se reconvertir au plus vite pour faire vivre sa famille.

Rapidement embauché, en 2013, par deux trentenaires caricaturaux chez Hubspot, un créateur de logiciels marketing, le narrateur plonge du jour au lendemain dans l’univers cruel de cette start-up située à Boston. Dans un récit cocasse qui confine à l’absurde (on retrouve des dialogues dignes de Beckett), voire à la démence (Kafka n’est pas loin), on se rend compte que le goût pour l’innovation a pris le pas sur la voix de la raison au sein de cette jeune entreprise qui a levé 100 millions de dollars auprès de VC.

Avec une culture d’entreprise qui se veut innovante et qui pousse le jeunisme à l’extrême, la start-up Hubspot fait de ses employés de véritables adeptes qui mangent, vivent, dorment Hubspot et doivent vouer un véritable culte aux deux patrons fondateurs. Des chiens se baladent librement dans les couloirs et les collaborateurs, qui travaillent assis sur des ballons, tous vêtus en orange, la couleur officielle de la société, se pâment devant « le mur des bonbons » de l’open-space.

Cette satyre pointe les dérives du tout « marketing » et de ces CEO qui se prennent pour des gourous : de l’ours en peluche qui préside toutes les réunions en tant que représentant du consommateur au mantra « 1+1=3 », qui guide toutes les décisions marketing, l’entreprise semble marcher sur la tête. Ce récit savoureux fait aussi la part belle aux sociolectes de l’entreprenariat : si on est assez « disruptif », on peut par exemple « créer le buzz » (go viral) et « faire sauter l’internet » (blow up the Internet). L’auteur nous fait vivre de près sa descente progressive aux enfers, de sa mise au placard à l’écriture de ce livre cathartique.

– – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – INTERVIEW DE DAN LYONS – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – –

Alors qu’en est-il réellement ? Est-ce là une critique globale de la Silicon Valley et de ses jeunes pousses ? Dan Lyons, l’auteur, étant par définition un homme connecté, désormais scénariste pour la série Silicon Valley de HBO, nous avons pris contact avec lui via Twitter. Car oui, aux Etats-Unis, les auteurs sont sur Twitter et ils y sont même très actifs. Dan a donc répondu à ces interrogations !

Anna Casal : Avec le recul, pensez-vous que votre expérience chez Hubspot ait été positive ?

Dan Lyons : Cette expérience était profondément désastreuse. J’étais si mal et si triste à l’époque où j’étais employé là-bas… De toute ma vie d’adulte, je n’ai jamais été aussi désespéré que lors de mon passage chez Hubspot. Ceci dit, j’y ai appris ce qui m’a permis d’écrire Disrupted !

A.C : Pensez-vous que toutes les start-ups ressemblent à Hubspot en termes de management ou de culture d’entreprise ?

D.L : Non, toutes les start-ups ne sont pas aussi dingues que l’est Hubspot. En réalité, les deux fondateurs de cette société essayaient de diriger une entreprise expérimentale. Ils ne voulaient pas seulement produire et développer un logiciel mais également réinventer la façon dont on dirige une entreprise. Hubspot était une sorte de laboratoire expérimental où ils pouvaient tester des théories de management sur des vrais êtres humains.

A.C : Est-ce que des fonds de capital risque (VC) ou des start-ups ont réagi à votre livre et comment ? 

D.L : 100% des emails que je reçois de mes lecteurs, VC et start-ups compris, sont positifs ! C’est assez étonnant, en fait. Même sept mois après la sortie du livre, je reçois encore des lettres de lecteurs qui me remercient car ils ont vécu eux-mêmes ce genre d’expériences traumatisantes !

Pour suivre Dan Lyons : abonnez-vous à son fil @realdanlyons et ou visitez son site (http://www.realdanlyons.com)

 – – – – – – – – – – – – – – LES PHRASES CULTES  – « Disrupted » de Dan Lyons – – – – – – – – – – – – – –

« J’aime beaucoup cette idée mais elle n’est pas assez 1+1=3 »
« Je suis la manager d’une équipe d’une personne. Et par une, elle entendait elle-même. Elle dirigeait donc le département des « relations influenceurs » (..). Un jour, pour Halloween, elle donna un discours lors d’une conférence, déguisée en sorcière, avec des chaussures brillantes, un balai à la main et un grand chapeau noir. Elle posta des photos d’elle-même ce jour-là sur Twitter »

« Le texte de la petite annonce pour un(e) responsable RP était édifiant : Vous pensez pouvoir nous faire faire la couverture de Time Magazine ? (…) La personne qui aurait pu postuler pour ce job (de RP) était, par définition, quelqu’un qui avait très peu d’expérience. Tout comme la personne qui avait écrit cette petite annonce »
« Vous êtes la première génération à accepter de travailler pour des bonbons gratuits. Ma génération n’aurait jamais cédé. Nous voulions être rémunérés en argent véritable.  Vous comprenez ? Non, ils ne comprenaient pas. »
« Je suis arrivé chez Hubspot avec des idées grandioses sur le journalisme d’entreprise. Au lieu de ça, à 52 ans, j’écris des articles idiots à longueur de journée, un cran en dessous des descriptifs de catalogues de vêtements »

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L’élection de Donald Trump signe-t-elle l’échec des médias aux Etats-Unis ?

 

« Against all odds » est l’expression américaine la plus adaptée pour décrire les résultats de l’élection américaine. Pendant près d’un an, l’opinion publique, au sens littéral du terme et par opposition avec les opinions privées, et les médias ont dénoncé, ridiculisé, moqué et, surtout, sous-estimé Donald Trump. Si l’on reprend les sondages publiés il y a un an, les chances de gagner de Trump avoisinaient les 5%. Comment expliquer le phénomène ? Pire, le New-York Times donnait à Hillary 84% de chances de gagner l’élection à quelques heures du scrutin. Aujourd’hui tout le monde s’interroge sur cette vague « trumpiste » que les observateurs les plus aguerris n’ont pas vu venir.

Entre effarement et déception, c’est un véritable mea culpa que la presse américaine a présenté au lendemain de l’élection présidentielle. Secoués, les journaux questionnent leur rôle et leur pouvoir : pour la sphère des médias, que souligne l’issue de cette élection ? Signe-t-elle l’affaiblissement du journalisme, sa transformation radicale ou la montée en puissance des réseaux sociaux ? Pour soutenir la première hypothèse, il faut se souvenir que tous les grands médias –locaux, nationaux, sectoriels, à deux exceptions près qui se sont engagés, tout au long de la campagne, l’ont fait de côté d’Hillary Clinton. Fait notable : pour certains, comme USA Today, cette prise de parti était une nouveauté. Au delà de cette prise de parti, des opérations médiatiques coup de poing ont ponctué la campagne pour affaiblir Donald Trump. Le New York Times n’a pas hésité à tirer à boulets rouges sur le candidat Républicain en publiant l’ensemble des insultes proférées par Trump dans une grande double page et ce, à quelques jours du scrutin. Instituant la loi du talion, le candidat Trump, lui-même, a jeté le discrédit sur la sphère médiatique pendant plus d’un an… suivre le fil de Laurence Haïm, correspondante de Canal Plus et d’i-télé, sur Twitter était instructif à cet égard. Cette fine connaisseuse de la politique US, accréditée à la Maison Blanche et qui a suivi la campagne de Trump jusqu’au bout, n’a eu de cesse d’alerter sur le sort que le candidat (et ses supporters) réservaient à la presse. Insultes, mise à l’écart volontaire, moqueries publiques, refus de faire des conférences de presse : tel a été le lot des journalistes « embedded » côté républicain.

Doucement mais sûrement, un fossé s’est creusé entre la politique et ce qui a longtemps été considéré comme le quatrième pouvoir. Dans ce bras de fer épuisant, il faut admettre que Donald Trump semble avoir gagné : les médias n’ont pas su informer. Etats des lieux aujourd’hui, 10 novembre : la presse n’est pas invitée à la première rencontre entre les vice-présidents (sortant et élu). Un événement inédit.

Il est intéressant de voir que les médias échouent là où les réseaux sociaux et la presse d’opinion trouvent leur place progressivement. Ces nouveaux modes de communication ont-ils volé aux médias traditionnels leur influence ? A noter qu’en anglais, on ne dit pas « réseaux sociaux » mais « médias sociaux », une nuance subtile qui revêt aujourd’hui une importance de taille. L’actualité prend la forme de faits bruts, vérifiés ou non (les tentatives de fact-checking ont échoué pendant la campagne), qui s’alignent sur nos Timelines. Le lecteur-internaute-électeur ne recherche plus l’information car elle lui est servie sur un plateau. En prime, c’est ce « consommateur d’information » qui s’abonne, suit et détermine quel réseau va lui fournir ces bribes et éléments qui vont alimenter une réflexion personnelle. Une personnalisation accentuée par les filtres des réseaux sociaux qui suggèrent tel ou tel contact (influenceur, média…). Ainsi, le laboratoire de recherche en journalisme, Nieman Journalism Lab, s’insurge-t-il aujourd’hui ,dans un article, contre ce mélange des genres qui consiste, pour les réseaux sociaux, à mettre au même niveau des publications sérieuses et des médias de seconde zone. Dans la course aux clics, une presse d’opinion qui ne dit pas son nom est en train de voir le jour, le groupe Breitbart News, soutien de Trump, en tête.

Alors quelles sont les leçons à tirer de cette élection en termes de communication ? Du point de vue des médias, on assiste aujourd’hui à l’effritement progressif d’un modèle qui doit retrouver son espace sur la scène de l’information. Hier, dans un article, le NYT plaidait ouvertement coupable d’avoir trop fait confiance aux sondages. « Toute l’incroyable technologie, le big data et les modèles de prédictions complexes que les newsrooms américaines ont utilisé pour couvrir la présidentielle n’ont pas pu sauver le journalisme américain : il est passé à côté de son sujet, à côté de la réalité du pays », peut-on lire dans un edito daté du 9 novembre. De nombreux journaux remettent en question les modèles et méthodes suivis par les instituts de sondages mais également leur fonctionnement économique, fondé sur l’achat des enquêtes par les médias eux-mêmes. Plus largement, en termes de communication pure et dure, cette campagne a également été très instructive. Comme le fait la Havard Business review, on peut faire une liste les recettes de communication du candidat gagnant et les appliquer à une start-up qui voudrait se faire connaître. Ce parallèle est intéressant et est peut-être une des clés : Trump est avant tout une marque et un insider de la communication qui a senti avant d’autres le vent des médias tourner…

 

 

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Les fonds français aux US (2/3): rencontre avec Romain Serman, directeur de Bpifrance USA

« Pour développer encore notre écosystème,  il faudra poursuivre sur plusieurs années le travail de fond entrepris jusque-là »

Pour poursuivre notre grande série sur les fonds français présents aux Etats-Unis, la rencontre de Bpifrance, présent outre-Atlantique depuis deux ans, était incontournable. Avec deux bureaux sur le sol américain, sur les côtes Est et Ouest, le grand fonds d’investissement français examine localement 240 dossiers par an. Nous avons rencontré Romain Serman, directeur de Bpifrance USA, qui a souhaité nous faire part de ses ambitions et décrire le positionnement des start-ups et fonds français aux Etats-Unis.  

Quelles sont les raisons qui ont amené Bpifrance à s’implanter aux Etats-Unis?

RS: Nous faisons aujourd’hui le constat suivant : depuis 3 ou 4 ans, on assiste à un véritable boom entreprenarial des start-ups tech en France.  Le marché français est suffisant pour engager une traction,  mais il reste, à terme, limité en taille, puisqu’il ne représente que 3 % du marché mondial de l’IT. Aujourd’hui, les entrepreneurs qui souhaitent créer une entreprise globale et toucher un marché plus large doivent s’internationaliser. C’est un modèle que l’on trouve depuis très longtemps en Israël, par exemple. Là-bas, les entreprises sont face à un marché de très petite taille. Elles développent donc leurs produits sur place et l’exportent très rapidement aux Etats-Unis, leur marché naturel. Présents dans la Valley depuis plus de 15 ans, avec de nombreux succès à leur actif, les Israéliens sont imbibés de cette culture business californienne. Au total, il y a ainsi 85 entreprises israéliennes cotées au Nasdaq !

Pourquoi accompagner des entreprises françaises dans la Silicon Valley ? 

Tout d’abord, le marché américain de la tech recèle un potentiel énorme, puisqu’il représente 50% du marché mondial. Par ailleurs, il s’agit d’être au plus près de ses concurrents comme des centres où se décident les futurs standards technologiques. Enfin, et c’est peut-être l’essentiel, dans la Silicon Valley, on a accès immédiat à un savoir-faire unique, s’agissant des start-ups comme des fonds de Private Equity. Les VC [Venture capitalist, ou capital-risque NDLR] sont présents ici depuis 30 ans et examinent les dossiers du monde entier : ce sont des investisseurs qui ont une connaissance encyclopédique du domaine et qui affichent les plus beaux track-records au monde. Je suis convaincu que ce savoir-faire doit circuler pour faire progresser notre propre écosystème et qu’il faut aller chercher l’expérience là où elle se trouve.

Quels sont les profils de start-ups françaises que vous rencontrez aux Etats-Unis?
Généralement, les entrepreneurs français se développent aux Etats-Unis sur un modèle « distribué ». La R&D est souvent conservée en France, car elle est moins onéreuse, le turnover des ingénieurs y est plus faible et les développeurs disposent d’un très haut niveau de qualification. Aux Etats-Unis, les start-ups françaises implantent un bureau qui comprend, le plus souvent, le CEO, les « sales », le marketing et le « customer support / success ». L’entrepreneur qui immigre a un rôle clé dans cette organisation, car il est celui qui lève des fonds, recrute et qui incarne la vision de son entreprise, les 3 fonctions-clefs du CEO ! Enfin, c’est souvent une condition sine qua non dans la Valley – la présence du CEO – car les fonds américains adoptent une attitude très « hands-on » et veulent pouvoir rencontrer à tout moment les entrepreneurs qu’ils accompagnent.

Quelles sont, plus précisément, les missions de Bpifrance aux Etats-Unis ?

Nous suivons trois grands axes de développement dans la Valley :

  • Nous recherchons activement des entreprises françaises à fort potentiel, dans lesquelles nous pouvons investir en capital ou accompagner en dette ;
  • Nous soutenons les entreprises de notre portefeuille qui décident de s’implanter aux Etats-Unis. Dans ce cadre, nous nous concevons comme une véritable plateforme de services qui met en contact ces entrepreneurs avec  l’environnement local (avocats, contacts RH, clients potentiels…) ;
  • Enfin, nous sommes proches des fonds VC américains, avec qui nous souhaitons co-investir. Ces derniers ont, comme je le disais, un savoir-faire solide et une expertise qu’ils peuvent partager avec nous. Nous collaborons sur des dossiers d’investissement et échangeons sur les bonnes pratiques.

En tant que fonds d’investissement français, quels sont vos atouts ici ?

Bpifrance a une importante force de frappe, ce qui nous permet de réaliser des investissements conséquents dans l’environnement très exigeant de la Silicon Valley. Au-delà de l’aspect financier, qui peut être bloquant pour des fonds d’investissement de plus petite taille, la difficulté principale est d’entrer dans le cercle très fermé des fonds historiques de la Valley. Il va sans dire que ces derniers n’attendent pas les fonds français et sont « auto-suffisants » dans leur fonctionnement. C’est donc en apportant notre propre valeur ajoutée et en démontrant que notre savoir-faire est complémentaire que nous parvenons, au fil des années, à gagner la confiance et l’intérêt des fonds locaux. Concrètement, cela passe par un travail quotidien de rencontres avec les VC américains -150 au total depuis le mois de janvier- mais aussi de communication sur les atouts des entreprises venues de France. Nous organisons ainsi des dîners en cercle restreint sur des thèmes transverses, où notre point de vue a une véritable valeur ajoutée. Pour ne citer que deux exemples, nous avons notamment organisé un événement autour des fondateurs d’entreprises issus de l’immigration (une licorne sur deux est fondée par des immigrants) et un dîner sur l’intelligence artificielle, domaine dans lequel la France dispose d’une avance conséquente.

Comment envisagez-vous l’avenir ici pour nos start-ups ?

Je suis extrêmement optimiste pour la tech française. La déferlante observée depuis deux ans n’est pas près de s’arrêter et gagne chaque jour en qualité. La France donne naissance à des entreprises très innovantes. Pour développer encore notre écosystème, il faudra néanmoins poursuivre sur plusieurs années le travail de fond entrepris jusque-là. Les « cocoricos », c’est bien, c’est sympa, c’est surtout nécessaire pour contrer l’indécrottable pessimisme français, mais soyons aussi réalistes et humbles : il nous reste énormément de travail à réaliser et les marges de progression de nos entrepreneurs, comme les nôtres évidemment, sont encore considérables. Bref, on progresse fort mais ce n’est, à mon sens, que le tout début de l’émergence de la tech française. C’est excitant ! C’est là tout le rôle de Bpifrance que de soutenir ce mouvement des start-ups françaises.

Pour en savoir plus: bpifrance.fr

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Les fonds français aux US (1/3) : quelle(s) stratégie(s) pour s’implanter aux Etats-Unis ?

Ils sont 13 aujourd’hui (source AFIC). 13 fonds d’investissement français de Capital développement ou de Capital innovation qui ont choisi de placer leurs pions aux Etats-Unis.Difficile d’en dresser une typologie tant leurs profils sont hétéroclites : d’Ardian, le mastodonte généraliste, à Cathay Capital en passant par Creadev, ISAI ou Bpifrance, tous pionniers de leurs secteurs, ils ont tenté l’aventure américaine. Mode, pari risqué ou axe structurant de développement?

A première vue, difficile de comprendre quelle place les fonds d’investissement français pourraient prendre sur ce marché. Comme l’avoue un investisseur français sous couvert d’anonymat, «il ne faut pas le nier, le marché américain est très difficile d’accès avec des valorisations très importantes et une concurrence monstrueuse. Y aller sans avoir réfléchi à son positionnement et sans réels moyens, c’est prendre un risque réel».

Avec plus de 2000 fonds de private equity locaux présents sur le marché américain, les Frenchies et leur modeste potentiel d’investissement font pâle mine. Delphine Descamps, Managing Director de Creadev USA, note : « la puissance de feu des fonds d’investissement américains est réelle et le marché très codifié. Par exemple, quand ils investissent en seed, pour être plus réactifs, ils le font très souvent en notes convertibles (obligations) et reportent ainsi les problématiques de valorisation et de pactes d’actionnaires à la série A (1er tour) ».Delphine Descamps explique également que les fonds d’investissement américains sont les champions de l’accompagnement et ce dans tous les domaines. « Les fonds d’investissement américains ont de plus en plus des compétences multiples en interne : marketing, RH, CFO… ». Chaque fonds d’investissement américain est également très spécialisé, que ce soit dans un secteur particulier ou dans un stade d’investissement précis (seed, série A, B ou C). Il s’agit d’un marché très structuré, donc, avec des codes bien précis et un fonctionnement rôdé depuis plusieurs années, voire des décennies.

Enfin, autre spécificité, le marché américain du Private Equity est très hétérogène sur son territoire: « Sur la côte Ouest, les fonds de private equity constituent un cercle très fermé : seuls un tiers d’entre eux participent aux meilleurs deals », note Delphine Descamps. Si on souhaite entrer sur ce marché, il faut être sur place car cela exige beaucoup de réactivité et de gros moyens pour investir dans les start-ups les plus intéressantes. « On voit énormément de start-ups soutenues en seed avec des valorisations très élevées du côté de la Silicon Valley », explique un investisseur.
Sur la côte opposée, à l’Est, la typologie des entreprises est différente : si San Francisco reste la Mecque de la tech, New-York attire, elle, des entreprises de plus grande taille et de secteurs plus diversifiés.Par ailleurs, « la côte Est est plus proche de l’Europe géographiquement, elle permet aux entreprises françaises d’approcher le marché américain en gardant les bases de la R&D en France avec une distance plus facile à gérer », souligne Delphine Descamps. Autre élément déterminant: les valorisations à New-York sont plus abordables que dans la Valley. Conséquence pour les fonds d’investissement français : ils privilégient largement la Grosse Pomme, avec 13 bureaux de fonds qui s’y situent, contre 3 sur la côte Ouest.

Différents types d’approche pour les fonds d’investissement français
Face à ces défis multiples, inhérents à un marché mature et hétérogène, les fonds d’investissement français ne reculent pourtant pas. Globalement, deux grandes stratégies d’approche du marché se dégagent. D’une part, les grands fonds de private equity qui investissent directement dans des entreprises américaines, surtout dans le métier du Capital développement.
Ardian reste le meilleur exemple, avec actuellement 15 investissements dans des entreprises américaines et 11 entreprises US déjà cédées. Dans ce cas, la présence in situ du fonds se justifie pleinement, puisqu’il s’agit d’accompagner les entreprises au quotidien, ce qui suppose d’en connaître finement la culture propre. D’autre part, certains investisseurs misent, eux, sur la volonté grandissante des entreprises françaises d’aborder le marché américain. « Du point de vue de la valorisation de leur entreprise, il est très intéressant pour les entrepreneurs de se développer outre-Atlantique », explique Paul Strachman, venture partner chez ISAI à New-York.

Pour répondre à cette demande, des fonds de private equity de taille modeste font donc le grand pas : ouvrir une antenne aux Etats-Unis pour accompagner le développement des entreprises en portefeuille.
L’avantage ? Pouvoir effectuer une veille, mettre en relation les entrepreneurs avec des réseaux (banques, avocats, conseils) constitués par le fonds en amont. C’est, par exemple, le cas de Creadev : « Avoir un bureau à New York est une réelle valeur ajoutée qui correspond à notre volonté d’accompagnement long terme et à notre vision internationale », souligne Delphine Descamps. Cette vision de partenariat cross-border est partagée par ISAI : « Notre bureau est dédié à l’accompagnement des entreprises françaises de notre portefeuille et à l’investissement dans des entreprises françaises déjà présentes aux US», indique Paul Strachman.
BPIFrance n’est pas en reste. Les fonds d’investissement français multiplient les initiatives pour promouvoir les start-ups françaises aux Etats-Unis en développant des programmes comme le USA Impact, en collaboration avec Business France.
Les fonds d’investissement de moyenne taille sont donc prêts à investir outre-Atlantique, dès lors qu’une opportunité -française- intéressante se présente à eux.
Enfin, certains, comme Creadev, notamment, profitent de leur présence sur le sol américain pour examiner des dossiers de start-ups américaines qui voudraient s’internationaliser, en France ou ailleurs dans le monde.

Des stratégies de communication adaptées

Le choix d’une stratégie de communication est crucial et doit donc être adapté aux objectifs globaux des fonds de private equity. Certains fonds d’investissement français essaient de gommer leurs origines ou, du moins, de se positionner comme des concurrents directs de fonds américains, en embauchant notamment des investisseurs américains dotés de réseaux et d’un beau track-record aux Etats-Unis. Ces fonds d’investissement font alors de leur présence aux Etats-Unis un élément constitutif de leur ADN. D’autres encore, la majorité en réalité, décident de communiquer en direction des entreprises françaises via des blogs ou la participation à des événements de place afin de se constituer un dealflow de qualité de start-ups désireuses de s’internationaliser.
En termes de communication, la présence aux Etats-Unis permet enfin d’importer les Best Practices et de jouer la carte américaine comme un réel « plus ». C’est le cas d’ISAI qui tend à innover avec des opérations de communication « disruptives » sur le marché français, directement inspirées des pratiques et des problématiques de fond du marché américain (qui feront l’objet d’une prochaine chronique).
Pour n’en citer qu’une, Paul Strachman est à l’origine du grand événement organisé en septembre dernier à Paris autour de l’Intelligence Artificielle, un thème très en vogue aux US et sur lequel la France dispose d’un fort potentiel. En rassemblant tous les acteurs d’un secteur, (fonds, sociétés, chercheurs, conseils intéressés par ces questions) et en s’associant, pour l’événement, à des fonds d’investissement américains, ISAI fait vivre tout un mouvement tech. « Notre objectif, via cette conférence, est de créer un pont pour les start-ups entre la France et les US. Le sujet de l’Intelligence artificielle est particulièrement intéressant puisque la France est en pointe en la matière et l’écosystème est déjà vivant. Il nous est donc paru pertinent de créer un lieu d’échanges pour faire émerger des start-ups françaises et partager leur savoir », note Paul Strachman. Au total, ce sont 400 personnes qui se sont retrouvés au sein du Hub BpiFrance pour échanger sur les applications pratiques et l’avenir de l’AI.

Le pari de s’implanter aux Etats-Unis peut donc se révéler payant, à la condition de bien connaître ce marché, unique en son genre et que l’on ait défini une stratégie bien précise. Les fonds  d’investissement français ont beaucoup à y gagner, en proposant des passerelles aux entreprises françaises et en s’inspirant d’un pays qui est en avance dans de nombreux domaines. Une chose est sûre : le mouvement n’est pas prêt de s’arrêter !

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Tendance : les médias se réinventent pour les digital natives

Cet article a été publié dans le numéro 1 de la revue Les Confettis

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« Le mobile est devenu une extension de notre propre corps. » Derrière ce cliché, se cache toutefois une réalité sociologique et, plus largement, une vérité économique. Le secteur des medias est sans doute celui qui, le premier, a su tirer les conséquences de ce nouvel accès à l’information, devenu presque « naturel »…. Découvrons ensemble les nouvelles tendances.

Vous vous sentez désorienté au milieu de la multitude des nouvelles radios, TV, journaux online pointus et ultra spécialisés qui voient le jour au quotidien ? En soi, rien de plus normal: 8200 sites d’information en ligne et 39 000 journalistes cohabitent aujourd’hui sur le seul territoire américain – et presqu’autant en Europe ! A l’autre bout de la chaîne de l’information, notre mobile –ou notre tablette- nous offre l’embarras du choix, tant pour la consultation (sédentaire, nomade, en réalité augmentée ou virtuelle) que pour la forme (texte, audio ou vidéo) … Une offre pléthorique, qui peut générer une certaine tendance à la fainéantise. Selon les statistiques, nous ne passons jamais plus de 4 minutes à découvrir un article ! Tout l’intérêt de cette digitalisation à outrance est de pousser les médias traditionnels à toujours plus de créativité et d’innovation, pour le plus grand bonheur des digital natives.

Ces grands pionniers de l’info…

En 2014, aux Etats-Unis, le journaliste radio Alex Blumberg a pressenti le potentiel du nouvel usage du mobile, immodéré et polymorphe. En lançant son propre groupe de média dédié aux podcasts, Gimletmedia, il a fait d’une pierre deux coups. De l’invention du concept à la levée de 6 millions de dollars, cet entrepreneur a tout enregistré : ses discussions avec son associé, ses pitchs devant les fonds, les interrogations et… les moments de doutes qu’il confie à sa femme ! De ce contenu, il a tiré une série passionnante, éditée en podcasts sous le nom de Start-upUn carton d’audience aux US, qui a entraîné derrière lui toute une génération de journalistes. Aujourd’hui, le podcast se développe en effet à vitesse grand V outre-Atlantique. Sa vocation ? Devenir une source d’inspiration inépuisable, variée et nomade pour l’auditeur. De la popculture (www.thenerdist.com) à l’info économique éclectique (www.freakonomics.com), en passant par la compréhension de tout ce qui nous entoure (www.stuffyoushouldknow.com), le podcast marche sur les platebandes de la radio, au risque, à brève échéance, de lui faire réellement de l’ombre.

Mais l’ambition des médias ne s’arrête pas là. La digitalisation propose un nouveau segment au potentiel inouï : celui de la réalité virtuelle. Porté par le secteur des jeux vidéo, le marché du casque, qui transforme votre smartphone en « porte » vers un autre monde, atteint d’ores et déjà 700 millions de dollars. Certains y voient déjà le vecteur d’un nouveau type de journalisme prometteur, « en immersion ». Déjà, le Wall Street journal propose de se promener sur la courbe du Dow Jones, de voyager virtuellement à l’autre bout du monde pour y rencontrer des réfugiés ou de suivre en direct les JO de Rio cet été. 600 000 abonnés ont déjà téléchargé l’application du grand journal américain consacré à la réalité virtuelle. Le webdocumentaire prend aujourd’hui une importance inédite, au point que certains se demandent si cette tendance ne va pas être une véritable planche de salut pour journalisme et les médias.

 Quand l’information classique se réinvente…

 Néanmoins, la montée en puissance de ces nouveaux modes de consultation n’entame pas la puissance du journalisme écrit, loin de là. L’information brute, type dépêche de presse, étant accessible gratuitement, en temps réel, les médias écrits se doivent d’offrir de nouvelles plus-values. La première stratégie consiste à creuser les sujets et à développer des expertises. Une tendance que les blogs ont explorée au début des années 2010 et qui, aujourd’hui, a donné naissance à des plateformes dédiées aux tribunes et à l’investigation. Pionnier en la matière, le géant Medium, réseau de partage éditorial largement plébiscité aux Etats-Unis, véhicule une profusion d’expertises via de longs éditoriaux ou des textes techniques.

D’autres journalistes proposent, dans un format plus structuré, les newsletters comme antidote à l’infobésité. Ces formats courts, éditorialisés, s’affirment cette année comme la tendance de pointe. Leur objectif ? Sélectionner l’actu selon une ligne éditoriale propre pour offrir une « vision » incarnée et subjective du monde qui nous entoure. On peut ainsi s’abonner à des newsletters « cousues-mains » de grands journalistes américains (Ann Friedman du LA Times http://tinyletter.com/annfriedman ou Jamelle Bouie de Slate http://tinyletter.com/jbouie) ou de stars engagées, dans le sillage de Lena Dunham (http://www.lennyletter.com).

Reste un créneau que les médias écrits et les marques commencent à découvrir : celui de la conversation via des applis. Le succès de Slack, Whatsapp, Facebook Messenger, QQ Mobile ou We Chat inspire. En parallèle de l’émergence de cet univers conversationnel (chat, messageries et push-to-talk), certains groupes de presse imaginent un nouveau type de journalisme qui engage, en live, des conversations entre experts et lecteurs. De grands médias, comme le Wall Street journal ou le Huffington Post s’y sont déjà essayés…. avant l’apparition récente de pure players. Début février, l’appli Quartz a ainsi vu le jour en proposant d’envoyer des informations tout au long de la journée sous forme de courts textes, GIF ou courtes vidéos. La grande nouveauté est d’apporter davantage d’interactivité, en proposant au lecteur d’engager un dialogue et de recevoir plus de précisions sur tel ou tel événement… une appli qui inspire les grands médias désireux de se rapprocher encore du lecteur.

A travers la diversité de ces exemples, on perçoit que nous sommes aujourd’hui à l’aube d’une nouvelle ère de l’information. Plutôt que de déplorer la digitalisation et l’utilisation massive des mobiles ou tablettes, il faut désormais y voir, pour le secteur des médias, une opportunité unique de se réinventer, de créer, d’innover et de proposer au lecteur une nouvelle forme d’accès à la connaissance, toujours plus personnalisée.

Trois conseils des Confettis pour ne pas sombrer dans l’infobésité:

– Constituez votre propre fil d’actu médiatique sur les sujets qui vous passionnent (www.feedly.com)

– Sélectionnez tous les blogs d’experts et d’analyses qui traitent de vos sujets de prédilection (www.medium.com)

– Pour désencombrer votre boîte mail, sélectionnez une newsletter qui, chaque jour, condense l’actualité (http://timetosignoff.fr, http://nextdraft.com ou http://theskimm.com)

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Stratégies de communication politique: le débat Clinton Trump riche d’enseignements

C’est avec une grande attention que les Américains ont regardé le débat télévisé opposant Hillary Clinton et Donald Trump, les deux candidats en lice pour la Maison Blanche. A moins de deux mois de l’élection, on parle, dans New-York, d’un duel qui dictera, pour les prochaines années, le cours de l’histoire américaine,  mondiale peut-être. Les Américains ne sont pas les seuls à s’y intéresser de près : tous les étrangers vivant aux Etats-Unis se sentent concernés par une campagne qui s’interroge sur l’immigration et le mythe d’une Amérique – terre d’accueil.

Certes, on attendait des coups bas dans cette campagne, la plus éprouvante de toute l’histoire. Mais, au fond, personne ne savait vraiment quelle tournure prendrait cette discussion entre la première femme candidate à la présidence souvent taxée de technocrate et un magnat de l’immobilier très médiatique qui, de fait, n’a aucune expérience dans le domaine politique. Enfin, grande nouveauté en 2016, le débat était accessible en direct gratuitement dans le monde entier via les médias, les réseaux sociaux, Facebook et Twitter en tête.

En professionnel de la communication et des médias, le candidat républicain, porté par des sondages de plus en plus favorables lors des dernières semaines, a fait monter la pression d’un cran à quelques heures du débat. Habilement, il a laissé se répandre la rumeur qu’il allait inviter au débat la maîtresse présumée de Bill Clinton, Gennifer Flowers, avant de se raviser un jour avant le duel. Une façon de déstabiliser la préparation de la candidate démocrate qui s’est consacrée à cette éventualité pendant plusieurs heures. Quelques minutes avant le débat, l’équipe Trump a lancé un filtre Snapchat “Donald J. Trump vs. Crooked Hillary” pour décrédibiliser la candidate tandis que l’équipe d’Hillary bombardait les réseaux sociaux de messages et vidéos anti-Trump.

Fact checks en temps réel 

Plus largement, à l’heure du live et du streaming, les médias sont confrontés à un défi de taille : il faut aujourd’hui pouvoir décrypter la campagne et les arguments des uns et des autres et ce en temps réel, à la seconde près. Le NY Times, comme d’autres, a ainsi crée une cellule de fact-checkers, chacun spécialiste d’un domaine, pour rétablir la vérité et vérifier les informations. En direct, les discours sont confrontés à des preuves tangibles sur cet espace dédié. Précisément, une grande partie de la soirée a été consacrée notamment au soutien de Trump à la guerre en Irak, un fait que le candidat nie en bloc.

Si, dans un premier temps, Trump a largement mené la danse en imposant ses thèmes de campagne (dont notamment celui des traités commerciaux), Clinton a repris le dessus progressivement, sortant doucement de sa position de bonne élève appliquée qui lui vaut bon nombre de critiques. Sur les réseaux sociaux, un débat parallèle avait lieu. L’équipe de campagne démocrate suivait le duel et publiait en temps réel des documents, vidéos, voire photos pour soutenir le discours d’Hillary. Ainsi, quand elle est revenue sur ses origines, une photo de son père est apparue sur Twitter en quelques secondes à peine.

Cette réactivité du staff de campagne soulignait néanmoins le manque de spontanéité de la candidate dont les réponses semblaient toutes avoir été rédigées et…. corrélées à des tweets qui semblaient programmés en amont. Autre nouveauté : Clinton a invité, en direct, les téléspectateurs à visiter son site dédié au fact-checking. Du côté de Clinton, la nouveauté consistait ainsi à créer un mouvement global sur les différentes plateformes (TV, web, réseaux sociaux) allant dans une même direction. Un débat riche en termes de stratégies de communication multicanal et qui pourrait bien inspirer la présidentielle en France. Le seul regret que l’on peut avoir : certains sujets ont été seulement survolés, d’autres complètement éludés, comme celui de l’immigration ou de la santé.

Pour terminer, voici quelques comptes Twitter à suivre pour voir de près la campagne présidentielle américaine :
Matt Viser ‪@mviser : journaliste informé du Boston Globe, il réagit souvent à chaud et détient souvent des scoops
Laurence Haim @lauhaim : LA journaliste française la plus renseignée sur la politique américaine. Elle alterne Tweets sérieux et notes d’humour (avec des photos récurrentes des chaussures de l’attachée de presse de Trump)
Marc Suster @msuster : VC américain passionné par la politique et friand de débat
Dan Diamond @ddiamond : journaliste politique à Politico qui fait une véritable veille sur les réseaux sociaux

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RP: les sites & app indispensables, une petite sélection à destination des start-ups

Que vous soyez une start-up qui souhaite gérer ses propres relations presse en direct ou communicant en agence, Internet vous offre une large palette d’outils pour optimiser votre communication – et votre temps- à titre gratuit. Parmi les centaines de sites dédiés aux RP, voici une sélection des meilleurs outils trouvés sur la toile à destination des communicants.

· Construisez-vous un fil d’actu sur mesure: au-delà des Google Alerts, le fil d’actualité Feedly permet d’agréger les articles de votre secteur en temps réel. Rien de plus efficace pour effectuer une veille sur les tendances et angles adoptés par les médias sur vos sujets de prédilection.
· Illustrer vos communications sur les réseaux sociaux: avec un peu de pratique, le site Piktochart vous permet de construire de belles infographies ou posters. De leur côté, les sites Canva et Recite vous aident à construire des images pour mettre en valeur une citation ou un titre sur les réseaux sociaux.

· Affutez vos textes en anglais:  Hemingway App est LE correcteur en ligne le plus performant dans la langue de Shakespeare. Vous copiez-collez vos textes et l’appli signale les fautes d’orthographe, de grammaire mais également les termes confus, les phrases trop longues et les répétitions.

· Testez le titre de vos communiqués de presse (en anglais) Advanced Marketing Institute. En copiant un titre de CP sur le site, on vous en indique sa valeur marketing émotionnelle. Autrement dit, il vous donne en quelques secondes et gratuitement le pourcentage de chances que le lecteur lise le reste du texte.

· Organisez votre travail en vous focalisant sur une seule tâche: Self Control App est un petit logiciel gratuit qui bloque, pour une période définie par vos soins, l’accès à tous les sites qui pourraient altérer votre concentration. Ainsi, il écarte toute tentation d’aller consulter sa boîte email ou les réseaux sociaux.

· Simplifiez la relecture de communiqués en interne: Usez et abusez de Google Drive pour mettre en commun les documents de communication. Les communiqués de presse peuvent circuler jusqu’à 20 fois dans une même entreprise avant leur version définitive. La possibilité d’avoir un seul document qui enregistre les modifications de toutes les parties prenantes fait gagner un temps précieux… et permet de retracer facilement l’évolution du texte.

· Trouvez l’adresse email des journalistes facilement. Si vous ne disposez pas de base de donnée de journalistes à jour, vous pouvez (gratuitement!) obtenir l’adresse de votre destinataire. Grâce à SellHack, il suffit d’avoir son nom ainsi que le titre de sa publication : en moins d’une seconde, on vous donne son email pro.

· Accédez aux attentes des journalistes: aux Etats-Unis, plusieurs sites référencent quotidiennement les demandes d’interview des journalistes. Parmi les plus efficaces, HARO et Media Diplomat vous avertissent en temps réel et/ou plusieurs fois par jour des sujets en cours traités par les journalistes et les opportunités de prise de parole qui y sont associées. En France, on ne trouve hélas aucun équivalent gratuit.

· Evaluez et comparez votre impact sur le web: à partir d’un mot clé, le site Buzzsumo vous donne l’ensemble des articles parus sur un sujet donné et le nombre de partages sur chaque réseau social. Un outil précieux quand on souhaite comparer son écho médiatique avec celui de ses concurrents.

En espérant que cette petite sélection puisse adoucir et animer votre rentrée!